Si les smartphones sont aujourd’hui les objets connectés les plus vendus, la croissance exponentielle de l’internet des objets (IdO en français connu également sous l’acronyme anglais IoT ) n’en finit plus d’envahir notre quotidien : dans nos maisons et bâtiments, nos véhicules, nos villes et nos usines. Ce peut être une caméra, un thermostat, un bracelet, une télécommande ou encore un ensemble de capteurs actionneurs sur une chaîne de production industrielle.
Alors que l’on comptait environ 1 milliard de ces appareils dans le monde en 2010, ils seront entre 30 et 50 milliards en 2025 et pourront atteindre jusqu’à 100 milliards dès 2030. Le nombre d’appareils connectés augmente de manière exponentielle, accroissant par-là l’empreinte environnementale du secteur numérique.
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Selon l’Ademe, tous ces équipements pourraient devenir la seconde source de pollutions numériques dans le monde, après le réseau internet et les data-centers.
Concernant leur utilisation, tous ces objets connectés consomment de l’énergie. Pris de manière unitaire cela ne représente en moyenne qu’1,5 à 2 W par appareil mais rapporté à leur nombre toujours grandissant cela pourrait peser considérablement sur notre facture énergétique. Selon l’Agence Internationale de l’Énergie, les objets connectés ont atteint en 2015 une consommation électrique supérieure à celles du Canada et de la Finlande réunis.
Étudiant le phénomène, elle met en garde contre la consommation excessive des objets connectés et notamment ceux qui ne sont pas nécessaires au fonctionnement des réseaux mais qui sont connectés à eux, dans l’attente d’un "signal".
Car ces objets ne consomment pas seulement lorsqu’ils sont actifs mais aussi lorsqu’ils sont en veille. L’AIE estime même que 80 % de la consommation énergétique des objets connectés sert à maintenir leur connectivité au réseau.
Les constructeurs ont été appelés à améliorer leurs performances énergétiques dès leur conception. Quand certaines écoles d’ingénieurs demandent à leurs étudiants d’y réfléchir à deux fois avant de concevoir de tels objets.
Car selon l’AIE, le nombre de cette catégorie d’objets connectés explose particulièrement utilisés dans la domotique, la gestion urbaine et dans les transports. En effet, les contrôles des bâtiments commerciaux et les compteurs intelligents représentent au total plus de 56 % des objets connectés et plus de 12,1 TWh sur les 27,7 TWh consommés par les objets connectés de l’IdO. Le paradoxe est qu’ils sont utilisés le plus souvent pour réduire ou rationaliser la dépense énergétique.
Innovation "frugale"
Créée en 2012 à Valence, la jeune pousse Dracula Technologies développe un panneau photovoltaïque de 3e génération. Avec la collaboration d’une autre entreprise de la région, Genesink qui met au point des encres organiques conductrices, elle a élaboré un module qui permet de transformer la lumière en énergie. Protégée par une dizaine de brevets, sa technologie appelée "Layer" (Light as your energetic response) vise à équiper tous les objets connectés qui nécessitent des micro-puissances afin de les rendre autonomes et permettre ainsi de remplacer les piles.
Thermostats, capteurs de présence, détecteurs, télécommandes, ces objets sont aujourd’hui partout.
Les modules photovoltaïques organiques qui ne comportent donc ni silicium, ni terres rares peuvent produire de l’énergie grâce à la lumière, du soleil ou artificielle et ce dès 5 lux soit une quasi obscurité.
Brice Cruchon, le fondateur de Dracula Technologies, décrit son entreprise comme un ovni dans le monde de l’innovation. "Nous ne sommes ni affiliés au CNRS, ni au CEA et avons autofinancé notre recherche et développement grâce des contrats de collaboration pour être propriétaire de notre technologie".
7 longues années pour mettre au point et commercialiser ces modules qui aujourd’hui rencontrent une demande mondiale. Des clients aux États-Unis, au Japon et en France bien sûr, l’entreprise produit 100 000 unités par an, ce qui est encore peu au regard du potentiel de ce nouveau marché appelé "récolte d’énergie" ou "energy harvesting" en anglais.
Et si la culture du secret entoure ces secteurs de recherche, c’est bien parce que le marché est immense et que très peu d’entreprises détiennent aujourd’hui une solution durable et efficace. Les concurrents se comptent sur les doigts d’une main nous raconte Brice Cruchon. Deux entreprises françaises, une polonaise, une suédoise et une brésilienne font office de pionnières sur ce marché mondial très disputé.
1 gramme de matière par mètre carré
Pour se démarquer, Dracula technologies a tout misé sur une solution écoresponsable à base uniquement de matériaux organiques et facilement recyclables assure son fondateur.
L’entreprise a d’ailleurs initié cet été la procédure d’entreprise à mission. "Pour être tout à fait cohérente et faciliter le recrutement" insiste-t-il. Alors qu’elle compte une trentaine de salariés, son développement en effet ne va pas tarder à s’accélérer. La société cotée MGI Digital Technology (machines d'impression numérique) et le fabricant de cartes électroniques ISRA Cards sont entrés au capital et le programme européen EIC accelerator vient de gratifier l’entreprise d’une enveloppe d’1,6 million d’euros.
Au printemps prochain, Dracula Technologies compte ainsi passer à la phase d’industrialisation avec l’inauguration d’une usine de production. Une usine, là aussi pas tout à fait comme les autres, puisque ces modules sont produits grâce à une technologie d’impression spécifique.
Le principe se résume à l’impression de cellules photoélectriques sur des supports flexibles. L’impression à jet d’encre de quatre couches conductrices.
"Il ne faut qu’1 gramme de matière pour faire 1 mètre carré de panneaux et l’énergie pour le produire reste très faible" assure Brice Cruchon.
À titre de comparaison, un module de 40 centimètres carrés exposé à un éclairage de 1 000 lux peut produire jusqu’à 600 microwatts. Mais la plupart des objets connectés n’ont pas besoin d’autant, les panneaux peuvent être de plus petite dimension, de 4 à 6 centimètres carrés en moyenne. "À l’abri de l’humidité, ils peuvent durer au moins dix ans" surenchérit le chef d’entreprise.
Dopée par une directive européenne contraignant les constructeurs à rendre leurs appareils connectés plus frugaux en énergie, l’entreprise drômoise se dit prête à produire dès le prochain semestre 4 à 5 millions de modules par an.
Affichant en 2021 un chiffre d’affaires d’un million d’euros, Brice Cruchon s’attend à le voir tripler dès cette année. Une perspective indispensable pour pousser l’innovation estime-t-il. D’ici quelques années, Dracula technologies espère bien trouver une solution pour non seulement produire l’énergie renouvelable mais aussi pouvoir la stocker.
Dracula Technologies : des cellules photovoltaïques organiques pour remplacer les piles - France Culture
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