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Saturday, July 8, 2023

Des technologies occidentales toujours présentes dans les armes russes lancées sur l'Ukraine - Le Devoir

Au moins six personnes ont perdu la vie dans la nuit de mercredi à jeudi à Lviv, dans l’ouest de l’Ukraine, après une série de bombardements orchestrés par l’armée de Vladimir Poutine. Sur 10 missiles lancés, 7 ont été interceptés par les forces antiaériennes ukrainiennes, a affirmé un porte-parole. L’un d’eux ciblait un immeuble résidentiel.

Les missiles russes tombent chaque jour sur l’Ukraine, et plusieurs pays occidentaux, par l’entremise de leurs entreprises technologiques, en sont en partie responsables. Y compris depuis le début de la guerre.

C’est ce qu’affirme, preuves à l’appui, le Groupe de travail international sur les sanctions russes, dans un rapport publié cette semaine. Il pointe du doigt 155 entreprises étrangères dont plus de 1000 composants ont été retrouvés dans 58 missiles et équipements militaires russes analysés sur le champ de bataille ukrainien. Ces découvertes illustrent un certain mépris de la part de Moscou envers les sanctions économiques et les restrictions occidentales en matière de commerce international qui lui ont été imposées après son invasion de l’Ukraine.

Les deux tiers de ces compagnies sont des multinationales américaines. Plusieurs ont des bureaux et des usines de production au Canada.

 

Tout en rappelant que « la Russie dépend fortement de la technologie occidentale » pour sa « production d’armes de guerre » et que les composants retrouvés « ne sont pas issus d’anciens stocks », le Groupe appelle à une « application plus efficace des sanctions existantes ». Il recommande aussi le « renforcement du contrôle des exportations », mais également un ciblage particulier de ces mêmes exportations, passant désormais par des pays tiers où des sociétés-écrans permettent depuis le déclenchement de la guerre de contourner les sanctions.

Ces échanges indirects entre la Russie et plusieurs pays occidentaux sont passés de 54 % en 2021 à 98 % au quatrième trimestre de 2022, indique le groupe. Ils transitent en partie par la Chine, mais également par une constellation d’autres pays « amis » de l’Occident ne faisant pas partie de la coalition internationale ayant imposé des sanctions à la Russie, comme la Turquie, le Kazakhstan, l’Arménie, la Géorgie, ou encore les Émirats arabes unis.

Chiffres canadiens troublants

 

Le commerce international du Canada n’a visiblement pas échappé à cette réorganisation des routes, révèle une analyse de données fédérales effectuée par Le Devoir. Les chiffres montrent en effet une chute radicale des exportations de batteries au lithium (-91 %) et de circuits imprimés (-73 %), deux composants à double usage pouvant entrer dans la fabrication d’armes, vers la Russie entre 2021 et mars 2022.

Or, en 2022, ces exportations ont soudainement augmenté de 4000 % pour les circuits imprimés vers la Turquie, de 2700 % vers les Émirats arabes unis et de 900 % vers le Kazakhstan, des pays reconnus pour servir d’intermédiaires pour la Russie. Et ce, comparativement à l’année précédente.

Dans le cas des piles au lithium, le Canada en a envoyé 72 unités en Turquie en janvier 2022, soit avant la guerre. En octobre de la même année, ce sont 9650 unités qui y ont été exportées, soit 135 fois plus. Même chose au Kazakhstan, où le commerce de ces piles est passé de 116 unités en 2021 à 36 000 en 2022, soit 310 fois plus.

Les données fédérales ne mentionnent toutefois pas la destination ultime de ces exportations ni l’utilisation faite de ces produits qui peuvent entrer dans les composants d’équipements militaires, y compris les armes létales.

En mars dernier, la Turquie a discrètement resserré ses contrôles aux frontières pour finalement bloquer l’exportation et la réexportation vers la Russie de produits ciblés par les sanctions occidentales, dont plusieurs composants électroniques et électriques font partie. Le laisser-aller devenait gênant pour ce membre de l’OTAN qui faisait face à un tir nourri de critiques.

Preuves matérielles

 

Pour le Groupe de travail international sur les sanctions russes, il ne fait toutefois aucun doute que les composants critiques retrouvés dans les missiles russes envoyés sur l’Ukraine, mais également dans des drones, des véhicules blindés, des roquettes, comme des micropuces, régulateurs de tension, condensateurs, cartes mémoire… provenaient bel et bien de compagnies occidentales, dont les américaines Analog Devices, Texas Instruments, Intel Corporation, l’allemande Infineon, la coréenne Samsung ou la suisse STMicroelectronics. Pour ne citer qu’elles.

Dans le cas de deux missiles russes Kh-101 tombés sur Kiev en décembre dernier, l’analyse des restes a permis de conclure « avec une quasi-certitude » qu’ils avaient été fabriqués dans les deux mois précédant l’attaque, avec des composants occidentaux ayant possiblement réussi à contourner les sanctions, résume le rapport.

Contactée par Le Devoir, la compagnie américaine AMD, nommée dans le rapport, a dit se conformer « strictement à toutes les sanctions américaines et aux réglementations mondiales en matière de contrôle des exportations » et a rappelé avoir « suspendu toutes les ventes et l’assistance technique pour [ses] produits en Russie, en Biélorussie et dans les régions de Donetsk et de Louhansk en Ukraine en mars 2022 ». Elle assure aussi avoir un « solide programme de conformité à l’exportation » pour éviter les détournements de ses produits vers la Russie.

Même chose du côté de la japonaise Renesas. Le fabricant de semi-conducteurs, qui a des bureaux en Ontario, assure respecter « pleinement les sanctions qui ont été imposées à la Russie à la suite de son action en Ukraine » et dit s’opposer à ce que « ses produits soient utilisés pour des violations des droits de l’homme », a résumé un porte-parole.

Dans une déclaration laconique adressée au Devoir, Texas Instruments, pour sa part, dit ne plus vendre ses produits en Russie et affirme « ne pas soutenir ni tolérer l’utilisation de [ses] produits dans des applications pour lesquelles ils n’ont pas été conçus ».

En juin dernier, dans un document présenté aux membres du G7, dont le Canada fait partie, par la présidence ukrainienne, Volodymyr Zelensky a appelé les principales économies du monde à faire pression sur les pays qui n’agissent pas de manière convaincante pour contrôler les exportations de composants critiques vers la Russie.

L’enjeu est d’ailleurs crucial pour la suite de la guerre. En mai dernier, l’École d’économie de Kiev (KSE), le ministère ukrainien de la Défense et la Fondation Jamestown ont estimé qu’au début de cet été, la Russie allait atteindre des seuils très bas dans ses réserves de missiles Iskander 9M723 (12 %), de missiles Kalibr (11 %) et de ses missiles Kh-101 (5 %).

Or, selon l’Ukraine, la Russie s’est adaptée aux sanctions et devrait être en mesure de doubler sa production de missiles entre 2022 et 2023, la faisant passer de 512 à 1063, et ce, en utilisant des composants occidentaux dont Moscou ne peut pas se passer. Un constat troublant près de un an et demi après le début de la guerre que la Russie a lancée contre l’Ukraine et le début des sanctions qui ont été imposées à Moscou.

« La chaîne d’approvisionnement militaire russe a continué d’accéder aux technologies critiques occidentales depuis le début de la guerre, tout au long de 2022 et du premier trimestre de 2023 », dénonce le Groupe de travail international sur les sanctions russes, qui assène : « Le contournement des sanctions ne peut rester impuni. » Il demande au passage que le « cadre réglementaire » en place pour lutter contre le blanchiment d’argent soit à l’avenir appliqué « au contrôle des exportations », pour combattre cette dérive.

Depuis février 2022, les Russes ont lancé plus de 6 000 roquettes contre l’Ukraine, résume le Groupe, touchant 3 387 bâtiments et infrastructures non militaires et tuant 1 734 civils

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