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Friday, November 24, 2023

Le Parlement étend la liste des technologies clés pour la décarbonation de l'UE, nucléaire compris - EURACTIV France

Le Parlement européen a adopté mardi (21 novembre) sa position sur le Net-Zero Industry act (NZIA) étendant à 17 le nombre de technologies qu’il entend soutenir pour une industrie décarbonée en Europe. Toutefois, la liste sera probablement réduite lors des négociations finales avec les États membres où la question du nucléaire devrait refaire surface.

Lors d’un vote en session plénière mardi, les eurodéputés, portés par le Parti populaire européen (PPE — droite), Renew (centre) et les Socialistes et démocrates (S&D — gauche) ont adopté leur position à 376 voix contre 139 et 116 abstentions.

« C’est une bonne nouvelle pour le climat, pour l’économie européenne et c’est une réponse très claire aux Américains et leur IRA [Inflation réduction act] », a souligné à l’issue du vote l’eurodéputé allemand (PPE) et rapporteur sur le texte, Christian Ehler.

Le texte sera directement porté en négociations début décembre avec la Commission européenne et les 27 États membres.

Dans sa position, le Parlement prévoit de soutenir le développement de 17 technologies jugées nécessaires pour réduire à zéro les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050.

Depuis sa présentation par la Commission européenne en mars dernier, le texte a été largement remanié. Sur le nombre de technologies d’abord, dans la mesure où une petite dizaine de technologies étaient initialement concernées. Sur leur primauté de développement ensuite, puisque le texte prévoyait à l’origine deux listes, dont l’une avait priorité sur l’autre, car regroupant les technologies dites «stratégique».

Entre-temps, les parlementaires réunis en commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie (ITRE) ont abandonné l’idée de deux listes.

Du même coup, le nucléaire, initialement relégué sur la liste secondaire, a finalement droit au chapitre, tant pour ce qui concerne les réacteurs existants que pour les technologies futures comme les petits réacteurs modulaires.

17 technologies repertoriées

Le texte voté par le Parlement européen couvre ainsi 17 technologies : renouvelables (éolien, solaire, géothermie, hydraulique, etc.), nucléaire (fission, fusion, cycle du combustible), stockage d’énergie  ; captage, transport, injection, stockage et utilisation du dioxyde de carbone, du méthane et du protoxyde d’azote  ; hydrogène (transport, électrolyseurs, piles à combustible, propulsions et infrastructures de production et de ravitaillement), carburants alternatifs, biométhane, recharge électrique pour les transports, pompes à chaleur, efficacité énergétique, distribution d’énergie thermique et de réseaux électriques, fusion énergétique, électrification et de processus industriel à haut rendement pour les industries à forte intensité d’énergie et de carbone, production de biomatériaux et recyclage.

Pour ces technologies, le texte permet notamment d’accélérer les autorisations de déploiement et de mobiliser plus de moyens financiers pour leurs capacité de production.

En amont du vote, les observateurs s’interrogeaient déjà sur la nécessité d’ouvrir le champ à une liste aussi vaste de technologies.

«C’est un peu devenu une liste de course ou une liste au Père Noël», a tancé vendredi (17 novembre) l’eurodéputé français (Renew) Pascal Canfin, président de la commission parlementaire Environnement.

Pour son collègue Christophe Grudler, rapporteur pour son groupe (Renew) sur le NZIA, il s’agit de permettre à chaque État membre de développer, sur son sol, la technologie la mieux adaptée à ses capacités et à ses besoins.

Par exemple, « les Pays-Bas ont des attentes sur l’énergie de la mer, l’Autriche en matière d’hydraulique », a avancé l’élu en amont du vote. La France, elle, dispose d’attentes en matière de nucléaire.

En somme, « les choix sont souvent liés aux situations géographiques », a-t-il complété.

Négociations à venir

La position du Parlement européen dorénavant actée, M. Grudler souhaite que le texte soit rapidement adopté.

Les premières négociations tripartites — dites trilogues — sont prévues courant décembre, «mais il faut être conclusif au plus tard en janvier », a-t-il fait savoir.

« Le facteur temps m’inquiète parce que si nous ne sommes pas capables de voter en trilogue avant les plénières d’avril, nous ne voterons de nouveau qu’en septembre-octobre prochain » en raison des élections européennes à venir en juin 2024, a-t-il alerté.

À ce stade des discussions, l’élu craint que les États membres souhaitent restreindre la taille de la liste des technologies couvertes par le NZIA.

« Le conseil risque de venir avec une demande de liste beaucoup plus restreinte ». L’élu reconnait en cela que « quelques technologies peuvent être sujettes à débat ».

Selon nos informations, il pourrait s’agir des technologies de recyclage, celles liées au biomatériaux, mais aussi au nucléaire.

«C’est typiquement le genre de texte qui gonfle au Parlement et qui redégonfle après», a complété M. Canfin.

Et le nucléaire ?

Au conseil de l’UE, nombre d’États membres conservent leur aversion envers le nucléaire, comme l’Autriche, dont « la position sur le nucléaire reste inchangée », nous confie un diplomate européen. 

De fait, M. Canfin anticipe des discussions animées pour restreindre la liste lors des négociations en trilogues, car s’il y a des dizaines de secteurs qui sont ajoutés à la liste, «alors tout le monde devient prioritaire et, en fin de compte, plus personne ne l’est » a-t-il commenté.

Son de cloche similaire du côté des ONG, qui soutiennent une liste réduite, sans nucléaire et sans technologies comme le captage et stockage de carbone, jugées trop hasardeuses.

«Le Parlement a ouvert la liste à des solutions miracles imaginaires qui pourraient ne jamais se matérialiser [comme la fusion nucléaire et les petits réacteurs nucléaires], ce qui signifie que l’argent des contribuables sera détourné des technologies vertes clés nécessaires pour décarboner l’industrie européenne à temps», a fustigé en ce sens Camille Maury, chargé de mission au bureau européen du WWF.

Selon M. Canfin, «il y aura donc la question du nucléaire» avec notamment la France et l’Allemagne qui pourrait «se refaire plaisir» sur le sujet.

«Je ne préjuge pas du point d’arrivée final, mais j’espère que nous seront collectivement assez sages pour ne pas refaire la bataille qu’on a déjà eu avec la directive sur les renouvelables et la réforme du marché de l’électricité», a conclut M. Canfin.

[Édité par Frédéric Simon]

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