Magicien, prestidigitateur, illusionniste : un métier vieux comme le monde mais que Thierry Collet renouvelle, comme d'autres, en plaçant au centre de ses spectacles les nouvelles technologies et les croyances presque "magiques" qu'elles suscitent chez les spectateurs.
"Je suis fasciné par les croyances que font naître les technologies numériques", comme par exemple "les captations des données personnelles", explique à l'AFP le magicien de 54 ans, un des acteurs du renouveau de la prestidigitation en France, au sein de sa compagnie Le Phalène.
Prédire l'avenir ? Interroger l'au-delà ? "Scier" une femme en deux ? Thierry Collet "trouve plus intéressant de se poser des questions sur les 'Pegasus' d'aujourd'hui et autres outils numériques", qui ont des conséquences, parfois inquiétantes, sur le quotidien de chacun. Pegasus est un logiciel espion utilisé contre des opposants politiques, journalistes et dirigeants dont une liste a été révélée en juillet par un consortium de journalistes et Amnesty International.
"On utilise beaucoup de technologie en magie. J'essaie de repérer les innovations avant qu'elles soient utilisées par le grand public", explique le magicien qui participe régulièrement à des colloques sur l'intelligence artificielle et se décrit comme "friand d'électronique et de solutions high tech".
Il a progressivement investi les "zones de flou" dans l'esprit du public, nées de ces technologies (numérique, nouvelle conquête spatiale etc.) : il y a "ce qui existe, les projets et puis les spéculations" les plus farfelues, dit-il. "Mais ce ne sont pas tant les objets qu'on manipule que le public. Nos marionnettes, ce sont les gens", relève-t-il. Thierry Collet n'est "ni hackeur ni sorcier" : "Je raconte une histoire (aux spectateurs). Ils y croient, ou pas".
Passé par le Conservatoire national d'art dramatique de Paris, ce n'est qu'à 40 ans qu'il a découvert le mentalisme : donner l'illusion de facultés paranormales pour lire l'esprit des personnes. Dans un de ses anciens spectacle sur la reconnaissance faciale, Qui-vive, le magicien, muni de ce qu'il présentait au public comme un logiciel, pouvait par exemple "dire le nom des personnes, où ils habitent, décrire l'intérieur de leur salon, à partir de leur photo", prise au début du spectacle.
"Je fais la même chose que la NSA (l'agence de renseignement militaire américaine, NDLR.)", déclare le prestidigitateur, avec un humour à froid. "Lorsque je demande à un spectateur d'écrire sur un bout de papier, je vole l'info avec les outils psychologiques ou technologiques à ma disposition", assure-t-il, refusant, en bon magicien, de dévoiler le moindre de ses "trucs".
"Le rôle de la magie est d'interroger: ce que vous voyez, est-ce vrai ou faux ? Est-ce réel ? A qui ou quoi vous référez-vous pour le savoir ?", développe le prestidigitateur. "Résister" ou "pactiser" avec l'intelligence artificielle et des machines qui pourraient un jour dépasser le magicien ? C'est une des questions que développe le créateur dans son spectacle Que du bonheur (qui date de 2019, en tournée à partir de septembre).
Il y met en scène "une application" qui lui permet, en accédant aux données du téléphone d'un spectateur (mais tout est... magique), de deviner un mot auquel pense celui-ci et d'entrer dans son esprit.
En attendant, il présente cette fin de semaine L'Huître qui fume et autres prodiges, un nouveau spectacle, dans le cadre du festival Magic Wip, au Parc de la Villette, dans l'est de Paris, avant une tournée en France.
Thierry Collet, cet illusionniste qui met en scène les croyances "magiques" nées des nouvelles technologies - Franceinfo
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